Chapitre 1
Plusieurs spécialistes considèrent qu’il s’agit de la première lettre écrite par Paul, vers l’an 50. Elle est adressée à l’une des premières communautés chrétiennes en train de naître dans le monde païen d’Europe : c’est donc un témoignage de première main sur nos ancêtres directs dans le Christianisme.
Le premier chapitre peut être comparé au portrait fait par Luc de la communauté d’origine, à Jérusalem, après la Pentecôte et la première prédication des apôtres (Ac 2, 42-47). C’était une assemblée de juifs ayant reconnu en Jésus le Messie annoncé, constituée autour des témoins directs de la vie terrestre, de la mort et de la résurrection du Christ. Ils restaient des juifs, priant dans le temple de Jérusalem, même s’ils apparaissaient de plus en plus comme à part.
La communauté de Thessalonique était très différente. Même si certains de ses membres venaient du judaïsme, ils se trouvent tout de suite exclus de la synagogue. L’Évangile leur est annoncé par Paul, qui n’est pas un témoin direct, et par Sylvain et Timothée, qui n’ont peut-être jamais rencontré l’un des douze apôtres. Les Thessaloniciens ne sont témoins d’aucun miracle spectaculaire et pourtant ils abandonnent tout pour suivre Jésus, au point que leur foi, leur espérance et leur charité se manifestent dans leur vie jusqu’à rayonner autour d’eux. Comment comprendre une telle conversion ?
Paul l’explique : son annonce n’a pas été « simple parole ». Le monde greco-romain était parcouru par des gens qui se disaient sages ou philosophes et qui proposaient, contre rémunération, leur enseignement. La force et la pertinence de leurs raisonnements – c’est à dire leur simple parole – leur assuraient seules le succès. Ceux qui devenaient leurs disciples adoptaient une discipline et des règles de vie censés les hausser au-dessus des autres hommes et les libérer des contingences matérielles.
Paul ne promet pas cela mais le pardon des péchés et un humble rôle dans la construction du Royaume de Dieu. Mais la conversion au Christ ne se fait pas par la persuasion au travers de raisonnements ou de contes merveilleux. L’annonce de l’Évangile ne passe pas que par des mots : elle est aussi puissance. Comment s’exprime cette puissance ? De quoi s’agit-il ? Cela ne concerne pas précisément la parole ni l’Esprit Saint puisqu’ils sont cités à part. L’épître et les Actes des apôtres ne parlent pas non plus de miracle particulier à Thessalonique. Faut-t-il comprendre que les Thessaloniciens ont perçu chez Paul et ses compagnons une aura, un amour, une joie ou une paix qu’ils n’avaient jamais connu auparavant ? Ne peut-on pas se le demander ? Même si Paul et ses compagnons n’ont pas connu Jésus pendant sa vie terrestre, on peut croire que passait par eux quelque chose de cette miséricorde agissante du Christ qui attirait les foules autour de Lui. Il est possible aussi que le fait que Paul ne soit pas seul ait aidé à témoigner de cet amour divin.
Jésus avait dit à son Père : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. » (Matt 11, 25). Les petits enfants sentent quels sont ceux qui leur veulent du bien et ils mettent en eux toute leur confiance : ils sentent où est la force de l’amour et de la vie, sans se préoccuper de ces raisonnements qui peuvent être trompeurs. Ainsi se transmet l’Évangile.
Mais parole et puissance ne suffisaient pas encore : il faut l’action de l’Esprit Saint. Les nouveaux Chrétiens ne sont pas tant convaincus par cette parole et cette puissance qui viennent de l’extérieur que par l’Esprit de Dieu qu’ils découvrent en eux et autour d’eux. Alors seulement peut venir pour eux la « certitude », c’est à dire la conviction ou, pour traduire le grec en mot à mot, une grande plénitude. C’est Dieu qui convertit, et non Paul ni quelqu’autre missionnaire.