Première épître de saint Paul aux Corinthiens (extrait de la première partie) :
Le Christ, en effet, ne m’a pas envoyé pour baptiser, mais pour annoncer l’Évangile, et cela sans avoir recours au langage de la sagesse humaine, ce qui rendrait vaine la croix du Christ. Car le langage de la croix est folie pour ceux qui vont à leur perte, mais pour ceux qui vont vers leur salut, pour nous, il est puissance de Dieu. L’Écriture dit en effet : Je mènerai à sa perte la sagesse des sages, et l’intelligence des intelligents, je la rejetterai.
Où est-il, le sage ? Où est-il, le scribe ? Où est-il, le raisonneur d’ici-bas ? La sagesse du monde, Dieu ne l’a-t-il pas rendue folle ?
[…] Alors que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes. Mais pour ceux que Dieu appelle, qu’ils soient Juifs ou Grecs, ce Messie, ce Christ, est puissance de Dieu et sagesse de Dieu. Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes.
[…] Mon langage, ma proclamation de l’Évangile, n’avaient rien d’un langage de sagesse qui veut convaincre ; mais c’est l’Esprit et sa puissance qui se manifestaient, pour que votre foi repose, non pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu. Pourtant, c’est bien de sagesse que nous parlons devant ceux qui sont adultes dans la foi, mais ce n’est pas la sagesse de ce monde, la sagesse de ceux qui dirigent ce monde et qui vont à leur destruction.
Dans l’épître aux Galates, nous avons vu que saint Paul expliquait que la Bonne Nouvelle n’impliquait pas d’interdits, d’ascèses ni d’obligation particulière comme les religions de l’époque. Il libérait les nouveaux chrétiens des idées qu’ils avaient sur ce que doit être une religion.
Mais le monde gréco-romain de l’époque connaissait aussi de nombreux soi-disant philosophes qui se déplaçaient de ville en ville pour promouvoir leur sagesse. Ils se faisaient payer pour leur enseignement et les plus célèbres, vus comme des êtres divins, étaient disputés entre les cités à grand renfort d’argent. ils se vantaient d’apporter aux gens une sagesse qui leur donnerait la sérénité et les valoriserait ici-bas.
Paul doit insister pour ne pas être confondu avec eux. Son but n’est pas de renforcer la place des nouveaux disciples dans ce monde mais de les en libérer. Il s’agit de leur ouvrir la voie du Christ, voie en contradiction avec les sagesses du monde mais voie qui conduit à la liberté, à la vérité et à la vie éternelle. Aujourd’hui encore nous sommes sollicités par nombre de promoteurs de sagesses orientales ou américaines et de méthodes pratiques de développement personnel. Ils semblent parfois convaincants et on échappe difficilement à la tentation de les imiter. Il faut pourtant bien voir que leurs succès ne durent pas.
Le danger principal, et qui touche la plupart des Chrétiens que nous sommes, est de vouloir réconcilier sagesse du monde et sagesse de Dieu. Nous voulons nous faire une vie bien réglée, où le monde et Dieu aient chacun sa place, dans une certaine harmonie. C’est une illusion très courante mais qui paralyse la vie chrétienne.
La violence de la représentation du Christ en croix doit toujours nous rappeler que la voie de Dieu et la voie du monde sont incompatibles. Le monde est le domaine du péché : il a crucifié Jésus, le tuant de manière cruelle. Cet événement bouleversait et renouvelait complètement les idées qu’on pouvait avoir de Dieu, du rapport entre le monde et Dieu, des liens entre l’homme et Dieu. Avec la résurrection, cela doit rester le pivot d’unité de l’Église.